Prédication 28 juin 2020 (Romains 6.3-11)

Romains 6.3-11  : Ignorez-vous que nous tous qui avons été baptisés en Jésus-Christ, c’est en sa mort que nous avons été baptisés ? Nous avons donc été ensevelis avec lui par le baptême en sa mort, afin que, comme Christ est ressuscité des morts par la gloire du Père, de même nous aussi nous marchions en nouveauté de vie. En effet, si nous sommes devenus une même plante avec lui par la conformité à sa mort, nous le serons aussi par la conformité à sa résurrection, sachant que notre vieil homme a été crucifié avec lui, afin que le corps du péché fût détruit, pour que nous ne soyons plus esclaves du péché; car celui qui est mort est libre du péché.Or, si nous sommes morts avec Christ, nous croyons que nous vivrons aussi avec lui,sachant que Christ ressuscité des morts ne meurt plus; la mort n’a plus de pouvoir sur lui.Car il est mort, et c’est pour le péché qu’il est mort une fois pour toutes; il est revenu à la vie, et c’est pour Dieu qu’il vit. Ainsi vous-mêmes, regardez-vous comme morts au péché, et comme vivants pour Dieu en Jésus-Christ.

Chers frères et sœurs en Christ,

Aujourd’hui, Paul nous donne une réponse à un reproche qu’on lui fait souvent.La gratuité du salut, la grâce, qu’il prêche sans cesse, cette sola gratia, que la Réforme a mise en avant,lui vaut une objection que nous entendons fréquemment.L’insistance de la prédication sur la gratuité du salut de Dieu laisse supposer l’idée que nous pourrions faire n’importe quoi puisqu’au fond nous sommes devant ce qui pourrait se concevoir comme un laxisme sans commune mesure. Ce n’est pas ce que l’Evangile nous dit. Bien sûr que le péché est une réalité humaine, et, qu’il a son importance dans chacun de nos vécus.D’ailleurs l’apôtre nous précise qu’il est impossible de demeurer dans le péché afin que la grâce devienne d’autant plus grande. Cela reste difficile à entendre tant, pour nous,la notion de péché renvoie souvent au seul fait de commettre un acte moralement condamnable. S’en tenir à ce sens qui n’a rien de biblique c’est ne pas comprendre en quoi le péché est une inaptitude, une incapacité qui est une donnée de notre nature humaine.Et c’est bien parce que ce péché est l’envers de l’accomplissement humain que Paul tient surtout à nous faire comprendre que, comme chrétien, comme ceux qui suivent Christ,la faute en soi qu’est le péché,ne nous concerne plus.

Depuis notre baptême, nous sommes des créatures nouvelles sur lesquelles le péché n’a plus de prise. Paul nou sdit cela, non pas par un exercice intellectuel, mais bien à partir de sa propre expérience. Lui qui était Saul, l’horrible persécuteur, peut dire aujourd’hui, avec conviction, en démonstration et sans aucune ambiguïté : «Là où la chute a débordé, là, la grâce a surabondé ». Mais cela n’est aucunement une invitation à demeurer dans la faute, cela n’est aucunement une invitation à compter avec une déviance, quelle qu’elle soit, comme étant un facteur positif. Penser cela est totalement absurde. Cela reviendrait à dire qu’il faudrait faire du mal pour que le bien en sorte. Cela n’a pas de sens. Ou plutôt c’est bien ce qu’ont pensé, en leur temps, et, de façon toujours catastrophique pour l’humanité, certaines idéologies. Il est impossible d’affirmer, de reconnaître, de célébrer le péché comme cause de la grâce, comme si péché et grâce, grâce et péché se succédaient. Il est impossible d’attribuer à l’homme, dans une pieuse et importune insistance, la souveraineté de Dieu. De même qu’il est impossible d’attribuer à Dieu, dans une pieuse soumission, l’impuissance de l’homme. Pour autant, cette impossibilité multiple, nous ne pouvons la comprendre, nous chrétiens que par la puissance de la résurrection. Et pour nous faire comprendre cette puissance là, Paul nous ramène à un signe à savoir le baptême dans le Christ Jésus.« Ignorez-vous, nous dit-il, que nous tous qui avons été baptisés en Jésus-Christ, c’est en sa mort que nous avons été baptisés ? »

Le souvenir du «signe» du baptême,constitue le commencement visible et temporel de notre connaissance de Dieu.Le réformateur Jean Calvin aimait dire que, comme chrétiens, jamais nous ne recevons des signes nus et vides de sens à moins de les priver de leur vérité en les volatilisant dans des rituels sans contenus ou en leur attribuant une puissance magique.

C’est en tant que signe montrant et attestant l’interprétation transcendante que Dieu donne de la vie. C’est en tant que signe annonçant sa parole que le baptême est ce qu’il est à savoir un fait tangible, un fait porteur de la vérité, un moment saint c’est à dire un sacrement. Et c’est bien parce qu’il est sacrement que le baptême ne se contente pas de signifier seulement… Au contraire, il est, dans sa signification mêmeen tant que référence, une communication de la nouvelle création. Le baptême est dans sa significationune réalité éternelle, non pas de la grâce, mais, un moyen de recevoir cette grâce, de recevoir cet amour de Dieu.

Et lorsque Paul nous interroge en nous demandant : « Ignorez-vous que c’est en sa mort que nous avons été baptisés ? »Il souhaite que nous réalisions bien que c’est à partir d’un trépas, à partir d’une disparition que le signe du baptême parle à ceux qui sont capables de le remarquer.

Etre baptisé veut dire littéralement être noyé, être englouti, disparaître dans un corps étranger, être enveloppé par un élément purifiant.Le baptisé n’est jamais identique à celui qui a disparu, à celui qui est mort.Voilà pourquoi, il faut le répéter sans cesse : à travers le baptême nous ne sommes pas en présence d’un simple rite. Il n’est en rien un moment magique…Le sens de ce signe n’a rien à voir avec une quelconque doctrine consistant à partir à l’assaut du ciel.C’est, pour chaque chrétien, le témoignage de la mort du Christ, en qui la revendication implacable, la revendication absolue de Dieu sur l’homme ont triomphé de tout ce qui est mortifère dans nos existences.

Nous pourrions objecter que Jésus, lui même, n’avait aucun besoin de recevoir le le baptême d’eau et d’Esprit, et d’Esprit et du Fils et du Père, qu’il a reçu dans le Jourdain… Pour autant nous devons recevoir et voir ce baptême de Jésus également comme une nouvelle naissance en ce sens qu’à partir de là il va apparaître, après les trente années de vie cachée, comme nouvellement né. A partir de là effectivement il est pleinement présent dans son humanité infiniment sainte.A partir de là son visage nouveau va se manifester tout de suite par un comportement extraordinaire d’exemplarité.Le mystère du baptême de Jésus est le mystère d’une seconde naissance qui en réalité ne s’accomplit pas, ou du moins pas seulement en Jésus qui le reçoit, mais doit s’accomplir, et Jésus le reçoit dans ce but, pour que chacun de nous apprenne à vivre la nouvelle naissance, qui ne sera jamais complètement achevée d’être accomplie tant que nous ne serons pas passé nous-mêmes par ce que Jésus appelle son baptême qu’il doit recevoir, et avec quelle angoisse, tant que nous ne serons pas passés jusqu’au Père par notre passion, mort et résurrection, en et par celles de Jésus le Christ éternel de Dieu.

Chaque fois que nous assistons à un baptême souvenons nous de cela.

Quiconque est baptisé au nom du Christ est inclus dans cet événement. Quiconque est baptisé au nom du Christ est perdu dans cette mort, et,est absorbé et couvert par cette revendication de Dieu. « Quand tu te fais baptiser, disait Luther, tu te soumets à la noyade gracieuse et à la mise à mort miséricordieuse par ton Dieu bien-aimé ».

Voilà pourquoi, la vocation du chrétien, notre vocation peut se résumer dans le mot que reçoit celui qui deviendra Paul et qui s’appelle encore Saul aux portes de Damas,: « Je suis Jésus, je suis Jésus ! » Toute la vie du chrétien tient dans cette petite phrase : « Je suis Jésus ». Paul qui a vécu si passionnément et si profondément le mystère de Jésus, résume lui-même sa vie dans sa lettre aux Philippiens lorsqu’il dit : « Pour moi, vivre, c’est le Christ. »Ou encore dans ce qu’il dit aux Galates : « Et maintenant, ce n’est plus moi qui vis, ce n’est plus moi qui vis, c’est le Christ qui vit en moi. » C’est pourquoi si souvent l’apôtre emploie l’expression : « dans le Christ Jésus » ou « en Christ » Effectivement, toute la vie chrétienne est une vie qui se résume dans le mot dit par Christ à Saul : « Je suis Jésus. » Toute notre liberté chrétienne tient dans cette affirmation puisqu’en Jésus nous rencontrons le détachement et l’humilité éternelle de Dieu. Si nous vivons cette liberté qui tient dans le mystère de cette toute petite phrase : « Je suis Jésus. »alors, nous n’avons pas à nous embarrasser avec les normes et les règles morales ni avec les prescriptions doctrinaires.

Et cela simplifie énormément la vision de la vie authentiquement chrétienne : il s’agit uniquement de réaliser que Christ est en nous. Dans tout les cas, il ne s’agit pas de combattre nos défauts sous cet aspect et sous cet autre, pas plus qu’il ne s’agit d’acquérir telle ou telle vertu par un cheminement laborieux…Tout cela est sans doute à faire, tout cela est certainement indispensable… Mais nous ne serons au cœur même de notre vocation que dans la mesure où nous prendrons conscience de ce que notre seule action efficace sera de devenir pour les autres la présence même du Christ Jésus. Il n’y a, pour chacun de nous,pas d’autre manière d’être disciple, il n’y a pas d’autre apostolat concevable, il n’y a pas d’autre action efficace que cette action d’une présence authentique du Christ dans notre monde.

Incontestablement comme l’affirme Paul : « (..) si nous sommes morts avec Christ, nous croyons que nous vivrons aussi avec lui, sachant que Christ ressuscité des morts ne meurt plus puisque la mort n’a plus de pouvoir sur lui ».

Effectivement « nous croyons ». Mais comprenons bien que notre foi, la foi au Christ vivant et éternel est le pas incomparable, le pas irrévocable, le pas irréversible,qui franchit la frontière entre le vieil homme et l’homme nouveau, entre le monde ancien et le monde nouveau. Notre foi au Christ vivant et éternel, sous l’aspect pleinement paradoxal où elle est conçue est bien le tournant, le revirement, la conversion, dans lesquels est troublée et abolie la situation d’équilibre où sont en chacun de nous le « oui » et le « non », le bien et le mal, la grâce et le péché…

C’est bien parce que par,notre foi seule, nous sommes morts avec Christ, que sa croix est, pour nous, l’occasion de comprendre les problèmes de notre existence. 

Ce qui signifie au final que par la foi au Christ vivant et éternel nous avons l’audace de savoir ce que Dieu sait. Et, cette audace est possible en ce que, après avoir épuisé toutes nos possibilités propres,elle constitue cette audace la possibilité que nous possédons en Dieu, en Dieu même, en Dieu seul.

Et le sens visible de cela, le sens visible de notre foi chrétienne c’est la connaissance, selon laquelle la ligne de mort qui traverse la vie de Jésus constitue l’impondérable et la nécessité de toute vie humaine.C’est par conséquent , la connaissance, selon laquelle, en face de Dieu, nous sommes humblement des non-connaissants. Selon laquelle, devant Dieu, nous ne pouvons alors que faire halte, nous taire et adorer.Pour ,au final ,réaliser que la révélation et la vision de cet homme nouveau, de l’homme en qui Dieu a plaisir, c’est la résurrection de Jésus-Christ d’entre les morts. La puissance de la résurrection c’est cela. C’est la connaissance de cet homme nouveau, dans laquelle nous connaissons Dieu, et qui plus est, dans laquelle nous sommes connus de lui. La puissance de la résurrection, c’est la clef, c’est la porte qui s’ouvre toute grande, c’est le pas franchissant le seuil où nous découvrons qu’en Christ nous sommes mort au péché, certes. Mais surtout qu’en Christ nous sommes réellement ressuscité à la vie pour Dieu. Et qu’en cela nous avons à vivre pour lui à présent afin de devenir tout aussi réellement ce que déjà nous sommes en Christ !

Amen

Pasteur Jean-Paul Nuñez

Pour lire et télécharger la prédication en PDF :  Romains 6.3-11

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