Prédication du 7 juin 20

2 Cor 13.11-13: Au reste, frères, soyez dans la joie, perfectionnez-vous, consolez-vous, ayez un même sentiment, vivez en paix; et le Dieu d’amour et de paix sera avec vous. Saluez-vous les uns les autres par un saint baiser. Tous les saints vous saluent.

Que la grâce du Seigneur Jésus Christ, l’amour de Dieu, et la communion du Saint Esprit, soient avec vous tous !

Chers frères et soeurs en Christ,

 

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« Que la grâce du Seigneur Jésus Christ, l’amour de Dieu, et la communion du Saint Esprit, soient avec vous tous ! »

Voilà une belle parole d’Evangile qui nous est offerte en ce jour.

Paul qui nous l’offre aécrit cette parole en grec. Mais qu’importe grec, hébreu ou araméen, l’Évangile est toujours parlé dans la langue de la gratification. C’est à dire dans une langue, dans unlangage qui littéralement bénit le réel de nous offrir comme magnifique cadeau une sensation de verticalité, une perception de profondeur qui nous soulève, qui nous élève.

Comprenons que toute prière, toute louange, toute bénédiction, tout témoignage rendu à la parole de la Vie, à la parole vivante relève du langage de la gratification.Ce qui fera dire à Jean dans sa première lettre : « Nous avons écris tout cela, afin que notre joie soit parfaite » .

Tout l’Évangileest langage de gratification. Non seulement, effectivement, il nous gratifie d’une joie parfaite, mais il nous donne aussi la grâce d’être justifié d’exister.Et c’est parce qu’ilest à ce point lié à la grâce et au gracieux qu’il est appelé « l’Évangile de la grâce de Dieu ».

Contrairement à ce que certains s’évertuent de dire, la parole devie n’est pas assujettie à la lettre. Car ce n’est pas le texte en lui-même qui est la parole de Vie ; il n’en est que l’écriture, c’est-à-dire le travail qui consiste à lui donner une forme transmissible, audible, communicable. Ce qui signifie que d’autres écritures sont toujours possibles. « Devenez les poètes de la parole », ditJacques dans sa lettre . Devenir des« poètes de la parole » parce que, effectivement,la parole de vie n’est pas figée sur du papier.Et, le merveilleux qu’elle donne à entendre n’est pas un corps mort que l’on dissèque mais uneexpérience d’écoute, un déplacement qui nous transporte hors de nous même, qui littéralement nous « extasie » comme il est dit en grec. C’est à dire qui nous remplit de joie.

« Que la grâce du Seigneur Jésus Christ, l’amour de Dieu, et la communion du Saint Esprit, soient avec vous tous ! »

Ces derniers mots de cette lettre de Paul aux Corinthiens sontune bénédiction. C’est exactement celle-ci qui est utilisée au cours de nombreux cultes. C’est unefabuleux rappel, un extraordinaire résumé de notre foi chrétienne.

En effet, c’est unrappel de la grâce en Jésus-Christ, lagrâce ou ce don gratuit de Dieu pour toute personne au-delà de ses erreurs, de ses faiblesses, de ses travers et de ses fautes.

Rappel, aussi et dans le même temps, de l’amour inconditionnel de Dieupour nous, toutes et tous, bien sûr. Mais aussi, ne nous en déplaise, pour toutes les créatures, sans aucune exception, de ce monde tel qu’il est. Enfin cette bénédictionnous rappelle ou plutôt nous invite à lacommunion du Saint Esprit autrement dità cette exigence de lacommunion fraternelle.

De tout cela il faut nous rappeler, il faut nous en rappeler sans cesse, car nous oublions vite et surtout nous nous satisfaisons rapidement d’apparences.

Rappelons nous d’abord de la grâce en Jésus-Christ notre Maître et Sauveur.Nous avons été jusqu’à l’inscriresur le fronton de nos Eglises ou de nos mémoires : sola gratia. Mais, pour beaucoup d’entre nous cela reste insignifiantau même titre que les «Liberté, Egalité, Fraternité » qui se trouve sur les frontons de nos mairies ou dans notre mémoire républicaine.

La grâce n’est que trop souvent envisagéeque comme doctrine,principe ou encore système qui voudrait quele pardon des péchés soit considéré comme une vérité universelle à savoir comprendrel’amour de Dieuseulement comme uneidée chrétienne de Dieu. En cela, sans nous en rendre bien compte, nous exprimons la négation de la Parole vivante, la négation même de l’incarnation de la Parole de Dieu à travers Jésus Christ.Et alors,nous nous contentons de justifier le péché et non point le pécheur sur lequel nous nous évertuons, encore et toujours,de médire avec détermination. Ce qui nous permet, en toute bonne conscience de vivre dans le monde,semblable au monde, et, comme le reste du monde.

C’est ce que le théologien allemand Dietrich Bonhoeffer appelait la «grâce à bon marché » dont il disait qu’elle était : « (..) la prédication du pardon sans repentance, (..) l’absolution sans confession personnelle. La grâce à bon marché, rajoutait-il, c’est la grâce que n’accompagne pas l’obéissance, la grâce sans la croix, la grâce abstraction faite de Jésus-Christ vivant et incarné ».

Effectivement, la grâce c’est l’évangile qu’il faut toujours chercher à nouveau; c’est le don pour lequel il faut prier, c’est la porte à laquelle il faut frapper.La grâce c’est tout ce qui nous atteint sous la forme d’un appel miséricordieux à suivre Jésus sur la voie de l’obéissance, tout ce quise présente à l’esprit angoissé et au cœur abattu sous la forme d’une parole de pardon, de relèvement et de réconciliation.

Comprenons bien,la grâce qui nous est offerte, dont nous sommes gratifiée,c’est une mission qui concerne tous les hommes. C’est bien en vue justement de notre libération à tous que Jésus se

présente tel qu’il est, dans cet état d’humilité et de dépossession absolue pour nousguérir de nos blessures et de nos flétrissures, pour nous faire accéder à nous-mêmes.C’est à dire ànotre véritabledimension humaine. La grâce qui nous est offerte est une mission qui consiste à aller proclamer, à aller exposer en paroles et en actes que tout le témoignage de Jésus-Christ n’avait qu’une seule signification celle de faire comprendre que Dieu est Amour, que Dieu n’est qu’Amour, et qu’il faut l’aimer et le faire aimer en aimant à notre tour.

« Que la grâce du Seigneur Jésus Christ, l’amour de Dieu, et la communion du Saint Esprit, soient avec vous tous ! »

Justement l’amour de Dieu dont nous parle Paul, après la grâce, est cet élan quiva vers un Autre.

Et c’est justement là le cœur du cœur de l’évangile. Dans le témoignage rendu par Jésus, il y a cette affirmation magnifique que la vie de Dieu est un altruisme, la vie de Dieu est un mouvementvers l’Autre, qu’en Dieu toute la vie va vers l’Autre, qu’en Dieu toute la vie est une immensepassion d’amour sans cesse renouvelée. Désormais, par la grâce de Jésus Christ, nous comprenons que par son amour, Dieu est le contraire d’un quelconque pharaon qui possède toutes choses.Dieu est le contrairedu despote qui impose sa règle à toute chose.Au contraire, Dieu est celui qui ne possède rien, qui ne peutrien posséder, qui est radicalement dépossédé de tout.

« Que la grâce du Seigneur Jésus Christ, l’amour de Dieu, et la communication du Saint Esprit, soient avec vous tous ! »

Paul nous offre cette bénédiction pour que nous réalisions bienque lorsqu’on aime vraiment quelqu’un, on désire son bonheur. Si on l’aime infiniment, on désire que son bonheur soit infini, et que notre désir le soit lui-même. Jésus, le premier, parce qu’Il nous aime infiniment, veut pour nous un bonheur infini.Et le premier mot de sa vie publique sera « Heureux ! », répété une bonne dizaine de fois.Et le meilleur signe auquel on reconnaîtra qu’une personne est chrétienne authentiquement sera qu’elle répand le bonheur autour d’elle.

Et nous, nous, là où nous sommes tels que nous sommesnous avons à tout faire pour que Dieu soit pleinement heureux. Certains pourront faire remarquer que Dieu est parfaitement heureux de toute éternité.Alors, ils n’ont qu’à bien regarder la croix qui nous rappelle que Dieu estéprouvé par l’homme. Récemment certains de nos frères et soeurs chrétiennes ont prié pour que Dieu sauve le monde de la pandémie qui frappe la planète… Pourquoi pas ? Et c’est bien tant l’intention est bonne. Pour autant, reconnaissons que ce sont bien nosattitudes d’humains narcissiques qui compromettent le bonheur de Dieu en malmenant toute la création sans aucune retenu. Réalisons bien qu’en crucifiant, chaque jour, la création, comme nous le faisons, nous compromettons le bonheur de Dieu.

Dieu ne peut être parfaitement heureux que lorsque nous coopérons à l’accomplissement de son éternel dessein d’amour. Et ce dessein, sublime, de Dieu quant à l’homme, c’est que, dans le coeur de tout homme, dans le cœur de chacun de nous,le Père, avec le Fils et l’Esprit, puisse engendrer et faire naître le Christ éternel. Et surtout que, du coeur de tout homme, c’est à dire de chacun de nous,l’Esprit puisse jaillir… du Père et du Fils, de l’Engendrant et de l’Engendré.

Dieu n’a pas d’autre volonté quant à chacun de nous. Et c’est bien ce que nous implorons dans la prière de Jésus lorsque nous disons : « Que ta volonté soit faite ».

Souvenons nous que la seule chose que le Ressuscité fait lorsqu’il apparait aux disciples, c’est qu’il souffle l’Esprit sur eux en leur donnant le pouvoir de remettre en son nom les péchés et les travers des hommes. C’est ici qu’il faut commencer peut-être à comprendre une chose si peu souligné, c’est que le péché c’est à dire tout nos manquements à une humanité authentique, tout nos traverset autres déviances, tout cela fait obstacle au bonheur de Dieu.

Dieune peut pas être parfaitement heureux, et nous combler du même bonheur, si nous ne faisons pas de notre coeur ce temple de son offrande où, parfaitement à l’aise, sans plus qu’aucun péché continue à y dresser quelque obstacle, le Père enfante le Fils et l’Esprit jaillit de l’Un et de l’Autre, de leur engendrement réciproque. Notre coeur, le cœur de chacun de nous, doit être le lieu d’un surgissement et d’un jaillissement éternels.

Voilà pourquoi, Paul nous invite à la communion du Saint Esprit autrement dit il nous appele à cette exigence de lacommunion fraternelle qu’il résume en nous donnant une démarche simple dans son accomplissement: « Audemeurant, nous dit-il, soyez dans la joie, travaillez à votreperfectionnement, encouragez-vous, soyez bien d’accord, vivezdans la paix, et le Dieu d’amour et de paix sera avec vous ».

C’est cela le règne de Dieu demandé dans la prière du Notre Père c’est cela l’éternelle volonté de Dieu que nous avons à faire, et c’est cela qui fait le bonheur de Dieu, et c’est cela, éminemment, qui peut faire le bonheur des hommes à savoir qu’ils deviennent un immense Corps du Christ qui naît du Père et d’où jaillisse l’Esprit. Dieu ne désire aucun autre règne ni n’a pas d’autre volonté.

« Que la grâce du Seigneur Jésus Christ, l’amour de Dieu, et la communion du Saint Esprit, soient avec vous tous ! »

Amen

Pasteur Jean-Paul Nunez

 

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