Message de Helmut Schumacher

Lors du culte de 28 juillet, nous avons tous aimé le message-témoignage de Helmut.

Il nous a autorisé de le partager avec vous:

Dans la vie de tous les jours, nous n’avons souvent, voire jamais, conscience que nous recevons bien plus que ce que nous donnons et que c’est surtout la gratitude qui constitue la richesse de la vie. Et pourtant, la gratitude est trop facilement oubliée.

Vous connaissez toutes et tous ces mots qui introduisent une question à laquelle vous aimeriez avoir une réponse. Combien de fois, au cours de votre vie, vous êtes-vous posé cette question ? Dans votre dialogue intérieur, vous êtes confronté à une question apparemment banale à laquelle il n’y a généralement pas de réponse. La voici :

Pourquoi moi ?

Faut-il vraiment se poser cette question si la vie suit son cours dans le bonheur, si elle se déroule comme on le souhaite, comme on pense l’avoir mérité : Le bonheur sur terre à chaque nouveau jour et de préférence pour toujours !

Mais que se passe-t-il, lorsque le bonheur se transforme soudainement en malheur, lorsque le présent n’est plus le passé (si aujourd’hui n’est plus hier) ? Perte, maladie, souffrance, mort, bref : tout ce qui constitue les abîmes de la vie.

C’est alors que surgissent toutes les questions qui découlent d’une crise existentielle et qui aboutissent à la question de toutes les questions :

Pourquoi moi ?

Et je sais de quoi je parle et vous le savez aussi, parce que justement ce pourquoi moi fait partie de notre condition humaine, fait partie de l’alpha et de l’oméga de l’être humain. Peut-on l’exprimer plus justement qu’avec ce chant gospel afro-africain, publié pour la première fois en 1867 dans les États du Sud, à l’époque de l’esclavage.

Nobody knows the trouble I’ve seen

Nobody knows my sorrow

Nobody knows the trouble I’ve seen

Glory, Hallelujah

*

Sometimes I’m up

Sometimes I’m down

Oh, yes, Lord

Sometimes I’m almost to the ground

Oh, yes, Lord

En français :

« Personne ne connaît les problèmes que j’ai vus

Personne ne connaît mon chagrin

Personne ne connaît les problèmes que j’ai vus

Gloire, Alléluia

*

Parfois, je suis en forme

Parfois je suis en bas

Oh, oui, Seigneur

Parfois je suis presque à terre

Oh, oui, Seigneur »

N’est-ce pas ce que nous ressentons tous aux heures sombres ?

“Personne ne connaît mon chagrin, …

parfois je suis en bas, parfois presque à terre. “

Dans mon désespoir, dans mes batailles avec le soi-disant destin, dans mes détresses, elle est remontée à la surface, cette question : Pourquoi MOI ?

Et c’est ainsi qu’il fut à nouveau oublié, le psaume 121.7 que mon pasteur protestant de Francfort-sur-le-Main me donna le 19 avril 1963 pour m’accompagner sur le chemin de ma vie – plus encore : avec toutes mes angoisses face à ce qui m’attendait, ce compagnon de vie sous forme de verset biblique, ce psaume, n’était plus un soutien dans ma foi.

“L’Éternel te gardera de tout, il gardera ton âme ;

L’Éternel gardera ton départ et ton arrivée, dès maintenant et à jamais “.

Nous tous, ne faisons-nous pas cette expérience lorsqu’une crise existentielle s’abat sur nous ? Dans une phase où nous pouvons craindre d’être éjectés du centre de la vie, sommes-nous encore forts et inébranlables dans notre foi ?

Cette expérience abyssale de l’abandon et de l’impuissance ressentie, nous la partageons avec beaucoup de personnes, même avec celles que nous croyons plus fortes, plus fermes, plus inébranlables dans leur foi dans le message chrétien.

Deux exemples choisis dans l’histoire:

– Je pense à Martin Luther, à l’histoire de sa vie. Combien de fois a-t-il été en proie au doute, combien de fois a-t-il traversé la vallée de l’angoisse avec ses peurs !

Trop humain !

– Et je pense au théologien allemand et pasteur protestant Dietrich Bonhoeffer, chrétien déclaré et convaincu dans la résistance à l’époque du nazisme. Il a été exécuté le 9 avril 1945 dans un camp de concentration bavarois, sur ordre personnel d’Hitler.

“Il fait sombre en moi…”,

c’est ce qu’il a dit dans sa cellule juste avant de se rendre sur le lieu de son exécution.

Trop humain !

ET

Jetons un regard en arrière sur la vie de Jésus et sur l’histoire de sa passion.

Toute sa vie, Jésus a essayé de réaliser la volonté de Dieu. A la veille de la crucifixion, Jésus avait lutté avec son Père dans le jardin de Gethsémani et avait finalement donné son accord pour la Passion: « O Père, si tu le veux, écarte de moi cette coupe! Toutefois, que les choses se passent, non pas comme moi je le veux, mais comme toi tu le veux. » (Matthieu 23,39)

Les Évangélistes Luc 23,24 , Marc 15,34, Matthieu 27,46 et le psaume 22,2 témoignent de la dernière heure de Jésus sur la croix.

Dans l’Evangile selon Matthieu, chapitre 27,46, nous lisons :

Vers la neuvième heure, Jésus s’écria d’une voix forte :

” Eli, Eli, lema sabachtani ? “

c’est-à-dire ” Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’avez-vous abandonné ? “

Trop humain !

Dans ce contexte, on peut interpréter ce cri désespéré, où s’exprime toute cette angoisse de la mort, comme un cri abyssal de plainte, voire d’accusation. La crucifixion sur la montagne de Golgotha, cette phrase prononcée dans la détresse la plus profonde, était-elle à ce moment-là l’expression d’une séparation d’avec Dieu, son Père ?

Je ne le sais pas et je me sens incapable de l’interpréter.

Mais ce que je sais, et je le déclare et confirme, c’est que jamais Jésus n’a été plus proche de moi qu’aux heures sombres de ma vie. Lui qui, en tant que Fils de Dieu, portait en lui les mêmes doutes, les mêmes peurs, les mêmes détresses.

Mais, me direz-vous, d’où vient alors ce qui nous réconcilie, ce qui nous donne du courage et de l’espérance, ce qui apaise notre peur et même ce qui nous libère ?

De la foi en Dieu, comme Jésus l’a formulé dans la dernière parole sur la croix par laquelle il remet son esprit entre les mains du Père:

“Père, entre tes mains, je remets mon esprit”. (Luc 23 :46)

ou

comme l’a exprimé Dietrich Bonhoeffer face au visage de sa mort, confiant en Dieu :

“C’est la fin, pour moi le début de la vie”.

Nous toutes et tous sommes conscients à quel point notre vie est dépendance et incertitude. Nous sentons toutes et tous que la vie nous est offerte et que nous pouvons recevoir ce cadeau comme un don immense et une grâce qui nous est renouvelé à chaque heure et à chaque minute.

C’est de cette gratitude dont je parlais en introduction. Cette certitude nous libère de la peur et de la haine, de la colère et des conflits intérieurs, car elle nous permet de faire l’expérience de recevoir le temps, toujours d’une manière nouvelle, comme un cadeau du Créateur.

C’est ce don qui nous fait comprendre, avec certitude, que nous sommes des enfants de Dieu – avec et par Jésus-Christ dans ce monde !

Ainsi, mon espoir, mon désir intime, nourri d’une foi chrétienne solide, reste de pouvoir conclure la fin de ma vie par ces mots :

“C’est la fin, pour moi le début de la vie”.

Et c’est là que la boucle est bouclée, en revenant à ma phrase de confirmation :

” L’Éternel gardera ton départ et ton arrivée, dès maintenant et à jamais. “

AMEN

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