Genèse 3 v 6 et Luc 4 v 5 à 8 (Le regard intérieur)
« Elle vit que l’arbre était bon pour la nourriture, un délice pour les yeux et désirable pour agir avec clairvoyance. Et elle en donna à son mari qui était avec elle. »
Luc 4 : v 5 à 8 : « Alors l’ayant mené en haut, il (le diviseur) lui montra en un instant tous les royaumes de la terre habitée et le diviseur lui dit : je te donnerai la puissance (la domination) et la gloire tout entière de tout cela, parce qu’elle m’a été livré et je peux la donner à qui je veux. Si tu te prosternes devant moi elle te sera donnée tout entière. Jésus lui répondit : « Il a été écrit : Tu te prosterneras devant le Seigneur ton Dieu et à lui seul tu rendras un culte »
Sœurs et frères en Christ,
Introduction : Apprendre à découvrir Dieu à travers la lecture de la Bible
Aujourd’hui nous continuons notre voyage spirituel avec Eve et Adam dans le chapitre 3 du livre de la Genèse, et, avec Jésus dans le récit de la tentation dans l’évangile selon Luc. Lors de notre dernière prédication nous avions dit que la venue de Jésus Christ dans notre vie était le début de la reconquête de notre cœur. Je rappelle que le cœur dans la Bible est le siège de notre réflexion, de nos décisions, de notre discernement, de notre esprit. Cette reconquête de notre cœur commence donc avec l’apprentissage d’une lecture assidue de la Bible. Il est important de nous familiariser avec la manière dont notre Dieu se donne à connaitre à travers les innombrables récits qui existent dans cette Bible. Je dis bien la Bible en son entier. Il nous suffit de la lire, cette Bible avec le regard du Christ Jésus, avec l’éclairage de l’Esprit Saint. Prenons un exemple en lien avec le texte de ce jour. Lorsque Jésus dans le récit de Luc dit : « l’homme ne vivra pas de pain seulement », Il fait une allusion au livre du Deutéronome chapitre 8 v 2 et 3 : Ce récit fait état des 40 ans passés au désert du peuple hébreux. Ils vivent un temps d’épreuve et aussi de renouvellement. Puis arrive dans ce récit cette parole « l’être humain ne vivra pas seulement de pain mais l’être humain vit de tout ce qui sort de la bouche de Dieu. Luc fait donc une allusion à ce passage du livre le Deutéronome. Le Christ Jésus, notre Seigneur s’inscrit donc dans une histoire qui le précède, dans des récits bibliques. Ces récits nous rappellent que Jésus le Christ est issu d’un peuple que Dieu conduit depuis fort longtemps. Il accompagne ce peuple. Il le porte. Même si ce peuple lui tourne le dos. La reconquête du cœur de notre humanité commence donc ici, dans ce récit dit de la tentation, avec Jésus notre Seigneur dans ce désert. Ce qui est bon pour notre nourriture spirituelle, c’est de se nourrir de la Parole de Dieu, afin que celle-ci au fil du temps soit une parole vivante qui règne dans nos cœurs.
Deux imaginaires à distinguer
Aujourd’hui nous allons faire un pas de plus grâce à ce double dialogue spirituel que nous propose Genèse 3 et Luc 4. Ces deux récits mettent en tension deux imaginaires. Dans les deux premiers chapitres de la Genèse nous avons découvert un Dieu bon, un Dieu plein d’attention pour notre humanité. Le chapitre trois, avec l’arrivée du serpent qui parle, nous fait basculer dans un contre imaginaire, celui du serpent. Cet autre imaginaire va se construire dans le récit en opposition avec celui du Dieu bon et aimant que l’écrivain biblique à mis en avant. Nous retrouvons cette même tension dans le récit de Luc avec les paroles du « diviseur » et les réponses de Jésus. Il est donc important de bien distinguer les imaginaires que nous proposent les écrivains bibliques lorsque nous découvrons leurs récits afin de discerner ce qui vient du Dieu bon et ce qui s’oppose à Lui.
Le regard intérieur : les yeux de notre esprit
« Elle vit que l’arbre était bon pour la nourriture, un délice pour les yeux. » Cet arbre est donc un délice pour les yeux. Ici le narrateur nous invite à réfléchir sur notre regard intérieur. Le regard intérieur c’est ce qui permet à notre esprit d’être tourné vers Dieu, d’être centré sur Lui. Nous ne devons jamais oublier que Dieu est Esprit, souffle de vie. Les yeux de notre esprit sont donc tournés vers Lui. Et parce qu’ils sont tournés vers Lui nous pouvons Lui rendre grâce et gloire. Nous pouvons Lui confier celles et ceux que nous aimons et celles et ceux que nous n’arrivons pas à aimer. Bref, ce regard intérieur de notre esprit a été détourné de ce pour quoi il a été créé. Il a été détourné, lorsque l’humanité, représentée ici par Eve et Adam, a fait le choix de donner plus d’importance à une autre parole que celle de son Dieu. L’écrivain biblique avec délicatesse nous indique un autre aspect de ce détournement de notre esprit par le serpent rusé. Eve et Adam en orientant leur regard intérieur vers l’exterieur d’eux-mêmes, vers le fruit de cet arbre de la connaissance du Bonheur et du malheur, se détournent de Dieu. Les yeux de leurs esprits s’échappent, en quelque sorte, s’éloignent de Dieu et vont s’attarder sur un aspect visible de la création de ce même Dieu, le fruit d’un arbre. J’insiste sur cet aspect visible de la création. Ils vont se focaliser sur une réalité concrète, un délice pour les yeux le fruit de l’arbre interdit. Le regard spirituel est donc détourné de sa vocation première : contempler Dieu. Vivre une relation paisible avec Lui. L’écrivain Biblique attire notre attention sur ce détournement de notre regard spirituel. Depuis lors notre regard spirituel s’épuise, se disperse et espère trouver soit dans le visible qui l’entoure une force, un soutien, une espérance, soit en lui-même force et réconfort. Les yeux de notre esprit, ont donc été détournées de l’essentiel, nous indique l’écrivain biblique. Notre regard intérieur quitte le domaine de la communion d’avec Dieu. Il va trouver maintenant sa raison d’être en lui-même, son existence en lui-même, sa reconnaissance en lui-même.
Quels sont les délices du fruit de l’arbre de la connaissance du bonheur et du malheur ?
Le contenu de ces délices va être décrits par le diviseur lui-même dans le désert grâce à l’Evangile selon Luc. « Il (le diviseur) lui montra en un instant tous les royaumes de la terre habitée et le diviseur lui dit : je te donnerai la puissance (la domination) et la gloire tout entière de tout cela… » « Il lui montra en un instant ». Il y a de quoi ici avoir le vertige. La tactique du diviseur est toujours la même éloigner les yeux de l’esprit de l’être humain de l’image et de la ressemblance du Dieu invisible. Le jeu des images joue à plein ici et l’Evangéliste s’en donne à cœur joie. Notre imagination peut en un éclair voir toutes sortes de royaumes, avec la puissance militaire de ces royaumes. En nous faisant miroiter une autre réalité apparemment plus brillante, plus puissante, plus séduisante nous nous détournons de la simplicité de la relation en Esprit et en Vérité que nous offre gracieusement notre Dieu : « Le diviseur lui montra en un instant tous les royaumes de la terre habitée et le diviseur lui dit : je te donnerai la puissance (la domination) et la gloire tout entière de tout cela ». Nous ne sommes plus ici dans un regard de contemplation, d’adoration mais dans un regard de conquête, d’acquisition, de gloriole, d’orgueil, de vaine gloire. Les délices qu’admire Eve en regardant le fruit de l’arbre de la connaissance du bonheur et du malheur deviennent un poison mortel par l’usage que nous allons en faire. La proposition du diviseur et de nous dire en toute simplicité : « tu vas exister par toi-même. Tu n’as pas besoin de Dieu pour te sentir vivant. Avec moi tu vas dominer le monde, ta vie et celle des autres. Les yeux de ton esprit trouveront le réconfort grâce à ton imagination qui sera à ton service. Elle te justifiera, te rassurera, t’aidera à créer des projets les plus fous où tu seras au centre de toutes les attentions » Notre imagination dont une des fonctions est de contempler le Dieu invisible est présentée dans ce récit de Luc comme l’esclave, de nos désirs les plus fous, elle sera aussi l’esclave de nos peurs et tentera par tous les moyens de les surmonter.
Une scène ubuesque
Le diviseur demande à Jésus qu’il se prosterne devant lui. La scène est quelque peu ubuesque ici. Le diviseur qui est, symboliquement, une autre figure du serpent qui parle de Genèse 3, donc une créature. Cette créature demande au créateur de se prosterner devant lui. La réponse de Jésus est troublante, car il cite à nouveau la Bible et notamment le livre du Deutéronome 6 v 11 à 14. Pourquoi est-elle troublante ? Car il offre la possibilité au diviseur de reconnaitre Jésus comme étant son Seigneur : « Il a été écrit : Tu te prosterneras devant le Seigneur ton Dieu et à lui seul tu rendras un culte ». Ce face à face est surprenant. Le diviseur, la créature, est face à son Seigneur qui lui rappelle qu’il doit se prosterner, lui aussi, devant son Dieu et qu’il doit lui rendre un culte. Ce dialogue spirituel indique clairement que le diviseur ne discerne pas, ou plus la présence de son Seigneur à travers le Christ. Il voit un être humain, au mieux un prophète de Dieu qu’il arrivera à berner au moins une fois comme tous les autres qui l’ont précédé durant son existence. Se prosterner devant le Seigneur Dieu, cette parole s’adresse aussi à nous être humains qui avons toutes les difficultés à fléchir les genoux devant le Dieu incréé Créateur de tout et Sauveur.
Que voyons-nous aujourd’hui ?
Et nous, que voyons-nous aujourd’hui avec les yeux de notre esprit ? Qui voyons-nous ? Notre regard intérieur a-t-il retrouver sa juste place dans le devant Dieu ? Si nous sommes rassemblés ce matin pour venir chanter à notre Dieu. Il est évident que oui. Arrivons-nous à discerner à travers la personne de Jésus la présence de notre Dieu ? Entendons-nous la parole de Dieu lorsque Jésus ouvre la bouche ? Les écrivains bibliques avec tact et discernement nous aident à y voir plus clair dans les attentes de notre Dieu pour chacun de nous. Ecoutons à nouveau la réponse de Jésus. « Il a été écrit : Tu te prosterneras devant le Seigneur ton Dieu et à lui seul tu rendras un culte ». Le délice pour les yeux de notre esprit est donc d’adorer, de contempler le Dieu invisible. Jésus ici, en sa pleine humanité, nous rappelle notre condition de créature. Une créature qui reconnait son Créateur. Dit autrement, il est inutile de chercher à être autre et plus que ce que l’on est. Reconnaissons-nous simplement comme des êtres humains, des êtres de paroles, fragiles, faillibles, limités, mortels. Ce n’est pas une tare, c’est un fait. Et dans cet humanité-là nous rendons un culte en esprit et en vérité à ce Dieu parole qui se révèle à nous. Et lorsqu’il se révèle à nous nous découvrons avec joie, que nous sommes aussi ses enfants adoptifs, pleinement pardonnés (justifiés) et appelés vivre selon son Amour déjà ici-bas en attendant de le vivre encore plus pleinement dans les temps à venir et tout cela grâce à l’œuvre de Jésus Christ sur la croix.
Un combat à vivre
Ceci dit, il y a un combat spirituel à mener. Il nous faut garder le cap. Nous nourrir de la Parole de Dieu, le contempler, l’adorer, l’aimer. Résister à cette folle course à l’exterieur de nous-mêmes ? A quoi bon s’épuiser à courir après une chimère ? A quoi bon courir après une gloire éphémère ou d’une vaine gloire encore plus éphémère ? Pourquoi nous laissons-nous séduire ? Cette folle course est vaine, vanité des vanités dira le livre de l’ecclésiaste. Et pourtant, elle nous taraude l’esprit. Et cela, soyons-en certains, jusqu’à notre dernier souffle. Cette folle course à l’exterieur de nous-mêmes nous taraudera tant que nous serons sur cette terre. C’est notre combat spirituel. Un combat de chaque jour, avec ses défaites et ses victoires. Mais au cœur de ce combat nous sommes déjà victorieux par celui qui a déjà remporté la victoire : Le Seigneur Jésus Christ ! Oui, par ce que nous marchons dans ses pas. A nous d’être vigilent dans notre cœur. Le cœur qui dans la Bible est le siège de notre esprit, de notre discernement, de notre mémoire, de notre réflexion, de notre imagination… Il est temps pour moi de conclure.
Contemplons la parole faite être humain !
Lorsque notre regard intérieur contemple le Seigneur Dieu en Esprit et en Vérité et lui rend un culte ; la paix de Dieu nous inonde, sa grâce nous soutient, son amour déborde de notre cœur, rempli notre âme et circule dans notre force. Alors nous pouvons dire en toute simplicité cette parole à Jésus notre Seigneur comme tant d’autres témoins avant nous et après nous. Nous pouvons dire cette parole en le contemplant avec les yeux de notre esprit : « O Christ, tu es l’image du Dieu invisible, le premier né de toute la création car c’est en toi que tout a été créé dans les cieux et sur la terre, le visible et l’invisible (…) Tout a été créé par toi et pour toi. Toi, tu es avant tout et c’est en toi que tout se tient. Toi, tu es la tête du corps-qui es l’Eglise. Tu es le commencement, le premier né d’entre les morts afin d’être en tout le premier car il a plu à Dieu de faire habiter en toi toute plénitude, et, par toi, de tout réconcilier avec toi-même aussi bien ce qui est sur la terre que ce qui est dans les cieux en faisant la paix, par toi, par le sang de la croix. » Amen (1colossiens v 15 à 20)