Prédication Jean-Pierre JULIAN

Luc 6 v 37 à 49

Introduction

Sœurs et frères en Christ,

C’est de l’abondance de notre cœur que notre bouche parle.

Pour rappel, le cœur dans la bible est le lieu où se situe notre intelligence, notre esprit, nos réflexions, notre intériorité. Ce cœur à une autre particularité, c’est qu’il peut s’entretenir en lui-même. Nous pouvons monologuer, dialoguer en pensée dans notre cœur. Ce cœur aussi à la possibilité par l’Esprit Saint de nouer un dialogue avec Dieu, de méditer Sa parole, de lui confier nos proches et nos projets, de le chanter, de le louer, lui dire en pensée toute notre reconnaissance. Bref, notre cœur est très actif. Mais au-delà de cette activité, une certitude demeure : personne ne connaît ce qui se trame dans nos têtes et c’est très bien ainsi. Tant que nous sommes silencieux, l’autre qui est en face de vous, ne sais pas ce que vous pensez. Certes vos yeux peuvent traduire une certaine émotion, mais cette émotion n’est pas toujours identifiable. Ce qui se vit dans votre cœur est donc insondable pour celui qui vous côtoie. Seul Dieu, nous dit la Bible, peut sonder nos cœurs et nos reins. Cela se comprend aisément, n’est-il pas notre Créateur et notre Sauveur ? De fait, Lorsque nous rencontrons une personne que nous ne connaissons pas, nous attendons, avec curiosité, ces premiers mots. Lorsque cette personne ouvre la bouche, nous commençons à découvrir sa personnalité, ses intérêts. Mais tant que cette personne n’a pas produit un seul mot de sa bouche, nous ne savons rien d’elle. Et même, lorsque cette personne sort quelques phrases, cela ne veut pas dire qu’elle se livre pleinement. Elle dit ce qu’elle veut bien dire. Et c’est très bien ainsi.

Le fleuve, la source et le cœur

Le texte du jour nous dit : C’est de l’abondance de notre cœur que notre bouche parle. Notre cœur est comme une grotte qui renferme beaucoup de secret. Notre cœur se retient de parler lorsqu’une situation devient trop complexe. Parfois, il est plus sage de ne rien dire pour ne pas envenimer une situation, d’autres fois, il est indispensable d’ouvrir sa bouche pour mettre fin à une situation intenable. C’est de l’abondance de notre cœur que notre bouche parle. Cette affirmation de Jésus, notre Seigneur mérite de s’y arrêter quelque peu. Si Jésus notre Seigneur, parle d’abondance cela sous-entend que notre cœur, lorsqu’il est rempli, est dans la nécessité de dévoiler le trop plein qui s’accumule en lui. Mais de quel trop plein parle-t-on ici ?

Nous avons tous vécu dans notre vie toutes sortes de tension au sein de nos familles, de nos églises, de notre entreprise, de notre association. Lorsque le comportement d’un individu nous est insupportable, si cet individu persiste dans ses voies, la moutarde nous monte au nez, et alors notre cœur déborde d’une parole bien ciselée, histoire de lui faire comprendre à cet individu que cela suffit. Dans cette situation que je viens de décrire, nous pouvons identifier la source qui a rempli notre cœur, c’est celle de l’agacement, de la colère. Celle-ci s’est accumulé suite au comportement pénible, à nos yeux, de cet individu. Donc parfois, des paroles agacées et blessantes jaillissent de notre cœur et même si nous regrettons, par la suite, une de ces paroles trop ciselées, la chose a été dite. Et on ne peut y revenir dessus. Ce qui est dit est dit. La question qui s’impose suite à cette réflexion est celle-ci : cette source qui a rempli notre cœur de quel fleuve est-elle issue ? Cette question est fondamentale et en plus il n’y a pas trente-six mille possibilités : Soit le fleuve qui abreuve la source de notre cœur est de notre propre cru. Ce qui veut dire, tout simplement, que cette source est alimentée par nous-mêmes, par ce que nous sommes. Comment pourrait-il en être autrement ? Soit la source de notre cœur est relié à un autre fleuve celui-ci plus paisible et o combien plus nourrissant. Donc sont en jeu notre intelligence, nos désirs, nos connaissances, notre sagesse, nos émotions, bref notre être entier. Mais une question demeure concernant toutes ces facultés que je viens d’énoncer : Quel est le fleuve, la source qui les abreuvent ?

Être ou ne pas être un étalon de mesure…

Mais avant découvrir ce fleuve paisible et nourrissant, écoutons une nouvelle fois ce que nous dit Jésus notre Seigneur : « Ne jugez pas et vous ne serez pas jugez. » Voilà une parole qui est un véritable uppercut. Ne pas juger, la belle affaire. Pourquoi avons-nous tant de mal avec cette seule phrase ? Car nous jugeons constamment, c’est même plus fort que nous. Si nous jugeons, c’est que nous considérons que nous sommes en capacité, en droit de juger telle ou telle personne. Nous nous sentons légitimes. Cette légitimité s’appuie sur notre vécu, notre expérience, mais pas seulement. Elle s’appuie aussi sur la morale que nous respectons et appliquons. Elle s’appuie aussi sur les règles de vie que donne l’Evangile. C’est du moins comme cela que nous comprenons les choses. Bref, nous jugeons l’autre parce que nous nous définissons comme un étalon de mesure. Posture agréable, certes, mais complétement inappropriée dans l’ordre de la foi. Être un étalon de mesure c’est accepter de se prendre pour Dieu.

Lorsque Jésus, notre Seigneur dit : c’est avec la mesure à laquelle vous mesurez qu’on mesurera pour vous en retour. Nous sommes bien obligés de reconnaitre que nous mesurons, nous jugeons les autres plus que nécessaire. Nous réalisons cela par nos pensées, mais aussi par notre parole qui, parfois, dépasse notre pensée. En effet, parfois notre parole galope comme un cheval sauvage et saute toutes les barrières de la retenue. Notre parole s’affirme haut et fort par un « je sais » qui n’est en réalité qu’un « j’imagine que » ce qui correspond, bien souvent, à lui faire prendre des vessies pour des lanternes. Nous jugeons, nous mesurons les autres par rapport à l’image que nous avons de nous-mêmes, et qui est, à nos yeux, une référence indépassable, une unité de mesure. Nous jugeons, nous mesurons les autres aussi par la sagesse, notre sagesse. Sagesse que nous avons acquise de haute lutte. Nous nous persuadons, au fil du temps, par exemple, qu’en politique, en philosophie, en théologie, en musique, en sport notre point de vue est vraiment intéressant, pour ne pas dire plus. Ce qui est clair avec l’Evangile selon Luc, c’est que nous sommes fortement encouragés à quitter ce fauteuil confortable de Juge qui n’est réservé, en fin de compte, qu’à Jésus Christ lui-même, qu’au Dieu fait être humain, qu’à Celui qui est Amour et justice. Et pour descendre de ce fauteuil, il est impératif de s’abreuver à un autre fleuve, de laisser entrer dans notre cœur cette source d’eau vive paisible et nourrissante qui s’origine en Christ Jésus notre Seigneur, le Crucifié ressuscité des morts. En venant parmi nous notre Sauveur à mis en place un nouveau canal qui permet au fleuve d’eau vive d’alimenter la source de notre cœur. Ce nouveau canal à été institué, créé par l’obéissance de Sa foi.

Le Fils est en nous

Il y a donc un canal qui a été créé par Jésus Christ. C’est le canal de la foi en Lui. Ce canal permet à ce fleuve d’eau vive d’entrer dans la source de notre cœur. Il y a donc un autre fleuve, un immense fleuve paisible et nourrissant qui est prêt à emplir la source de notre cœur. Ce fleuve d’eau vive devenu, au contact de notre cœur, nous apprend, une autre manière de voir la vie et de vivre la Vie. Et petit à petit, grandit en nous cet autre manière de voir la vie et de la vivre.Et c’est alors que nous pouvons dire à la suite de Jésus, notre Seigneur : Oui, « C’est de l’abondance de notre cœur que notre bouche parle. » Pour appréhender spirituellement cette « abondance » nous allons nous appuyer sur deux autres paroles de Jésus, notre Seigneur que nous a transmis l’Evangéliste Luc : « Donnez quittance et vous serez quitte, donnez et on vous donnera ». Pour donner faut-il être en capacité de donner. Pour donner faut-il être persuadé d’un plein ou d’un trop plein en nous. Si nous nous considérons plein que de nous-mêmes nous ne voyons pas l’intérêt de donner quoi que ce soit. Réécoutons cette parole de Jésus, notre Seigneur, Parole puissante, parole de vie : « Donnez et on vous donnera. » Nous ne sommes plus ici comme dans le jardin d’Eden où notre humanité décide de prendre et de consommer ce qu’elle ne devait pas prendre. Nous ne sommes plus ici dans une logique de prédation, d’acquisition pour soi seulement. Nous sommes avec Jésus, notre Seigneur, dans une démarche de don, une dynamique du don. Si nous pouvons donner c’est que nous sommes en capacité de donner. Mais de donner quoi ? Qui ? Souvenons-vous : lorsque Jésus, notre Seigneur, pendant la cène prend du pain et le rompt, puis le donne aux disciples en disant : « ceci est mon corps qui est donnée pour vous. Prenez, mangez » Dans cette action grâce que nous vivons, lors de la cène, Dieu, en tant que Fils, se donne entièrement à nous pour que nous vivions de Lui, en Lui et Lui en nous. Cette parole l’atteste :« ceci est mon corps qui est donné pour vous. » L’Apôtre Paul dans la lettre aux Galates est encore plus explicite, il dit : « Lorsque Celui (Dieu) qui m’a mis à part dès le sein maternel et m’a appelé par grâce, Il a jugé bon de révéler en moi son Fils afin que je l’annonce parmi les païens ». Si Dieu a révélé son Fils en nous cela sous-entend que le canal de la foi est ouvert pour que le fleuve d’eau vive empli notre cœur de ce don gratuit. Ce don gratuit c’est Sa Vie, cette Vie qui vient de Dieu seul. Dit autrement nous sommes les témoins de sa Vie car c’est sa Vie qu’il nous donne par Son Fils et en Son Fils. Donc prendre ce qu’Il nous donne lors de cène, le pain et le vin, c’est recevoir sa Vie, c’est vivre réellement de sa Vie, sans jamais la posséder. Car Sa Vie ne peut être possédé, elle ne peut être que donnée, témoignée. Donc, si nous vivons de Sa vie alors il y a de quoi donner en abondance. En effet, cette Vie est sans mesure, surabondante et cette Vie nous traverse puisque le Fils est en chacun de nous. Et cette Vie qui nous traverse va à la rencontre de nos prochains car notre Dieu a décidé de nous rendre participants à l’annonce de cette bonne nouvelle. Nos corps, nos vies sont là aujourd’hui pour témoigner de Son Amour, de son pardon, de Sa grâce surabondante. Oui, le Fils est en chacun de nous et nous sommes en Lui, en Christ, membres de son corps. Nous sommes alimentés, jour après jour, par ce fleuve de Vie qui vient du Père. Nous sommes nourris à cette Vie qui est rendu visible par le Fils en nous. Nous sommes abreuvés à cette Vie qui source en nous, nous ressource et source et ressource, hors de nous, par l’Esprit Saint ceux que nous côtoyons. Le Fils est en chacun de nous, soyons-en convaincu. Il a créé ce canal de la foi qui relie ce fleuve d’eau vive à la source qui alimente notre cœur. Et avec délicatesse et mesure notre intelligence, nos désirs, notre être tout entier est renouvelé pour marcher sur les traces du Christ en toute simplicité. Amen

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