Spinoza ou l’étincelle qui, mène à la lumière (Laurent Diop)

Quelle conception a donc Spinoza du Christ ?

Selon lui, les prophètes reçoivent la parole divine au moyen de leur imagination. Les prophètes sont donc nécessairement conditionnés par la sensibilité, les opinions, les préjugés personnels et culturels des prophètes, et ne doivent pas être lues littéralement.

Pourtant, Spinoza affirme, de manière très étonnante, que le Christ constitue une exception à cette règle : « le Christ a eu révélation des desseins divins concernant le salut des hommes, non par l’intermédiaire de paroles ni de visions, mais immédiatement. La voix du Christ peut donc être appelée la voix de Dieu, tout comme celle entendue jadis par Moïse. En ce même sens, nous pouvons dire aussi que la sagesse de Dieu, c’est-à-dire une sagesse surhumaine, s’est incarnée dans le Christ, et que le Christ devient voie de salut. Le Christ a communiqué avec Dieu d’esprit à esprit. Par conséquent à l’exception du Christ personne n’a jamais reçu la révélation de Dieu sans le secours de l’imagination, c’est-à-dire de paroles ou d’images visuelles. Spinoza qui connaît par coeur l’ancien et le nouveau testament tire cette conclusion de l’étude minutieuse des textes des évangiles. Ce qui le frappe, en effet, dans le discours du Christ, c’est que cet homme simple, qui n’a reçu aucune éducation poussée, ne prononce que des paroles véritables, profondes et universelles. Dans l’éthique, Spinoza suggère que le Christ correspond à l’homme libre véritable, qui n’a que des idées adéquates.

Au fond, le Christ incarne le modèle de sage, dont l’esprit est libéré de toutes les idées fausses et dont les affects sont parfaitement réglés par la raison. En cela il peut être considéré, non comme « l’incarnation de Dieu » mais comme « l’émanation de la sagesse divine ». Il n’est pas du tout nécessaire, pour faire son salut, de connaître le Christ selon la chair, mais il en est autrement du fils

Eternel de Dieu qui s’est manifestée en toutes choses, surtout dans l’esprit humain, et plus particulièrement en jésus Christ. A la question de savoir s’il fallait croire en l’incarnation de Dieu en l’homme Jésus, il répond que cette idée lui semble aussi « absurde que de dire que le cercle a pris la forme d’un carré ». De la même manière que l’homme Jésus est devenu le Christ dans la mesure où il reçu et vécu en plénitude la sagesse divine, on peut dire que tout être humain possède « l’esprit du Christ » s’il reçoit et vit la sagesse divine, c’est-à-dire s’il comprend et met en pratique les lois divines universelles. A ce titre, le Christ a transmis « des vérités éternelles, et, par là, il les libéra de la servitude de la loi et néanmoins le confirma et l’écrivit à jamais au fond des coeurs, à commencer par le commandement de l’amour du prochain.

Maintenant je voudrai parler brièvement des affects qui nous touchent en ces temps troublés.

Spinoza ne nie pas qu’il existe une forme de dualité en nous, mais celle-ci ne se situe pas, comme le pensaient Descartes et les moralistes chrétiens, entre le corps et l’esprit, entre la raison et les passions, mais entre la joie et la tristesse que Spinoza considère comme les deux sentiments fondamentaux. « La joie, dit-il, est le passage d’une moindre à une plus grande perfection ». Ainsi, la joie est l’effet fondamental qui accompagne toute augmentation de notre puissance d’agir, comme la tristesse est l’effet fondamental qui accompagne toute diminution de notre puissance d’agir. L’objectif étant d’organiser sa vie grâce à la raison pour diminuer la tristesse et augmenter la joie jusqu’à la béatitude suprême.

En conclusion je cite Spinoza : « Ne pas se moquer, ne pas se lamenter, ne pas détester, mais comprendre » le hasard n’existe pas il y a toujours une juste origine à toute conséquence même dans les cas soit disant désespérés !

 

Laurent Diop

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